Démarche :
HABITER un bord de monde,
MYTHOLOGIE DES FRONTIÈRES
[- Exposition de Opération à cour ouverte #17 de Culture à la Ferme, Beauquesne (80), du 14 septembre au 6 octobre 2024. Avec, entre autres, La Forge -]
Camps palestiniens, un bord de monde
Des productions des auteur·e·s du collectif, issues d’expériences, de plusieurs résidences en terres douloureuses palestiniennes.
De 2014 à 2018, La Forge aborde le mythe de la frontière, qui est toujours une « institution imaginaire », en se rendant en Palestine, sur cette « terre sans peuple pour un peuple sans terre » (selon le dicton sioniste). Ce mythe a conduit à la Nakba, à la catastrophe, à l’exil de palestinien·ne·s. Une partie d’entre elles et eux se sont réfugié·e·s, en condition spécifique, dans des camps sur leur propre terre, la Palestine. Dheisheh, Aïda à Bethléem, Al Amari, Qadoura à Ramallah, Askar à Naplouse…
Avec des œuvres de :
Christophe Baticle, socio-anthropologue :
Nos ambiguïtés avec une notion ambivalente : la frontière, texte
Valérie Debure, graphiste, atelier Nous Travaillons Ensemble :
La Vie Continue, création graphique réalisée avec l’historienne Sandrine Mansour
Olivia Gay, photographe :
La vie des camps, 4 photographies
Alex Jordan, graphiste, atelier Nous Travaillons Ensemble :
Je rêve…, montage photo-graphisme
Denis Lachaud, écrivain :
La fin du journal de Ramallah, extrait
Eric Larrayadieu, photographe :
Jeunes réfugiées palestiniennes, Les Représentants palestiniens, 2 montage-photos
Marie-Claude Quignon, plasticienne :
Vie difficile, Palestine en vrac, 2 peintures
Le Mur, parpaings de journaux
Tours et détours, De l’autre côté du mur, Le souk d’Hébron, 3 vidéos
La fin du journal de Ramallah
de Denis Lachaud (extrait)
Je me promène seul dans Ramallah. Depuis deux jours je pense souvent à Berlin, que j'ai découvert en 1984. Un cours séjour à Berlin-Ouest a marqué mon entrée dans une relation incarnée avec l'Histoire, mon époque, l'absurdité du monde bipolaire dans lequel je vivais. Jusqu'à ce jour-là, je connaissais la situation mais je n'étais pas réellement connecté à ces informations abstraites. A Berlin-ouest en 1984, on ne survivait pas, on vivait paisiblement ; chaque visiteur pouvait le constater, s'en imprégner. Puis en se promenant, il tombait soudain sur le mur qui venait lui rappeler brutalement le statut particulier de la ville. Deux rues plus loin, aucune trace palpable de la guerre froide. Juste la vie.
Hier j'ai roulé dans Ramallah avec Mohamed et nous nous sommes soudain trouvés face au mur, ce mur en perpétuelle extension. Cent mètres plus tôt, j'étais simplement en promenade dans une ville arabe du proche orient ; ville colorée, vivante, baignée à horaires réguliers dans le chant du muezzin.…
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Nos ambiguïtés avec une notion ambivalente : la frontière
de Christophe Baticle* (des extraits)
… toute frontière enserre et rejette, mais peut protéger comme opprimer, quand ce n’est pas les deux concomitamment.
Que tirer de cette conclusion dans la situation palestinienne?
… D’après toutes les lectures que nous avons pu avoir sur le sujet, comme de par nos observations réalisées in situ, l’option d’un seul et unique État ne recueille qu’un faible assentiment chez les Palestiniens qui, nonobstant l’espoir d’une abolition des frontières, souhaiteraient plutôt disposer de vraies frontières, qu’ils pourraient défendre des infiltrations armées de leur puissant voisin qui se comporte chez eux comme chez lui. De même, de véritables frontières leur donneraient la souverainement d’établir un droit foncier apte à interdire les colonies.
En définitive, la frontière est tout sauf un mythe. C’est parfois le récit de son établissement qui tourne à la mystification : « Une terre sans peuple pour un peuple sans terre », par exemple. Faire s’effondrer les frontières amènerait-il l’humanité à se doter d’un contenu plus protecteur ou favoriserait-il au contraire la loi du plus fort ? Et si la deuxième hypothèse l’emporterait, ne serait-il pas judicieux pour les réfractaires de se protéger derrière… des frontières ?
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* Socio-anthropologue Aix-Marseille Université / Laboratoire Habiter le Monde (Amiens)
Avec Sous tes paupières, poème d’Anne Soy,
don diffusé pour le finissage de l’exposition
Action réalisée
Auteur.e.s La Forge
Productions liés
- Journal de Ramallah de Denis Lachaud, juillet 2016
- Nos ambiguïtés avec une notion ambivalente : la frontière
- Marie-Claire Colignon